A tous ceux qui se lamentent de la généralisation de l’usage de l’anglais, voici une information surprenante qui vous redonnera de l’optimisme: une linguiste américaine de l’Université du Michigan a étudié pendant une décennie la langue d’un groupe aborigène vivant dans un village isolé du nord de l’Australie et elle a observé une nouvelle langue en cours de création, le Warlpiri rampaku. Elle s’est ainsi rendu compte que ce dialecte semble avoir des règles de grammaire différentes des langues connues jusqu’alors dans cette région. Le Warlpiri rampaku est parlé par environ 350 jeunes dans la communauté, qui compte 700 membres et se serait progressivement développé à partir des années 1980.
Pourquoi est-ce original?
Si un pidgin est, d’après la définition du Larousse, un « système linguistique résultant de la simplification d’une langue donnée, servant uniquement aux besoins d’une communication limitée, sans être la langue maternelle de personne (comme l’est un créole) »,le Warlpiri rampaku ne se rattache pas à cette définition car il est la langue maternelle des locuteurs. Un créole quant à lui « désigne aujourd’hui un système linguistique autonome, d’origine mixte, issu du contact d’une langue européenne avec des langues indigènes ou importées (Antilles), devenu langue maternelle et langue principale d’une communauté » (définition du cnrtl), et le Warlpiri rampaku n’est pas simplement le résultat du mélange de deux langues.
C’est donc bel et bien une nouvelle langue que la linguiste a découverte, et si de temps en temps, bien que rarement, de nouvelles langues sont découvertes, il n’est pas commun d’être un témoin direct de ce processus.
Comment la langue s’est-elle formée?
La linguiste décrit la formation comme ayant suivi 2 étapes: les parents ont commencé à parler à leurs bébés en langage « enfantin », ce langage mélangeant les langues de la communauté: l’anglais, le Kriol, et le Warlpiri. Sauf que les enfants à leur tour, ont fabriqué leur langue maternelle à partir de ce mélange, en ajoutant des innovations, notamment de la syntaxe et de la structure des verbes, qui n’existaient pas à l’origine, créant le Warlpiri rampaku, ou Light Warlpiri.
Pourquoi créer une nouvelle langue?
Ce qui surprend ici c’est que les locuteurs n’avaient pas besoin de créer une nouvelle langue pour communiquer faute de langue commune. La linguiste pense donc que ce processus répond à une question d’identité des jeunes, la nouvelle langue devenant un marqueur de celle-ci.
Les jeunes aborigènes de cette communauté sont donc en quelque sorte des polyglottes créatifs!
Et vous, comment inventeriez-vous votre propre langue?
Pour lire l’article original (en anglais) du New York Times: