Cela faisait un moment que nous voulions écrire ce billet sur un sujet éminemment culturel, celui du « beauf », sans jamais trouver le temps jusqu’à ce que cette semaine, en formation de FLE, nos étudiants nous posent la question. Fidèles à notre mission culturelle, on s’est dit qu’il était temps de partager avec vous ces éclairantes explications.
Mais qu’est-ce qu’un « beauf » ?
Déjà, pour commencer, ce n’est pas ça :
Un « beauf » (\bof\) n’est pas un « boeuf »( \bœf\).
Nous compatissons avec tous ceux qui apprennent le français car il faut avouer que les deux mots ont une similarité phonétique troublante.
Le mot « beauf » est un mot d’argot, c’est-à-dire utilisé dans la langue populaire, à l’oral (rarement à l’écrit), il est l’apocope de beau-frère, c’est-à-dire le frère de votre femme ou de votre mari.
La genèse du « beauf » : de la rue au crayon de Cabu
“Beauf” apparaît dans les années 1930 dans le langage populaire, assure Aurore Vincenti. On raccourcit, ce qui est la preuve d’une familiarité certaine. Il n’y a alors rien de négatif là-dedans. Beau-frère, c’est un peu guindé. Beauf, c’est complice. » Ça ne va pas durer. Après Mai 1968, comme beaucoup d’institutions, la famille est emportée par la révolution (ou par la chienlit, c’est selon). Le beau-frère, le beauf, le tonton, malmené par ses neveux en colère, devient sa propre caricature. Cabu s’en empare. Un personnage est né » (Source : Le Monde, voir ici).
L’idée de représenter le « beauf » provient donc de Cabu, un célèbre dessinateur de presse français, qui l’a représenté dans ses bandes dessinées dans les années 70.
Le « beauf » croqué par Cabu ressemble à ceci :
Un « mec » caricatural, représentatif du Français moyen, avec son ventre rebondi, sa baguette, son pack de bière et son t-shirt PSG.
Pour le dessiner, Cabu s’est inspiré d’un patron de bistrot de la ville où il vivait qui était aussi son propre beau-frère (Source : Slate, voir ici).
De nombreux albums de Cabu narrent la vie du beauf, en voici quelques exemples (vous pouvez cliquer sur les albums pour consulter une description détaillée sur Amazon):
Cabu explique « Le beauf c’est le type qui assène des vérités, ses vérités, il ne réfléchit absolument pas, il est porté par les lieux communs, par le « bon sens » entre guillemets, par des certitudes dont il ne démordra jamais. Il ne lit plus d’abord. Il ne lit plus de journaux. C’est la mort du papier. »
Le « beauf » est un cliché de l’homme français moyen, peu cultivé et assez vulgaire mais aussi content de lui-même. Le « beauf » s’assume tel qu’il est. Il aime par exemple la bière, le vin ou le pastis, la télé, les conversations de comptoir (au bar), le PMU (les paris hippiques), les soirées à regarder le foot avec les copains, les été en slip de bain au camping, les parfums de supermarché et les blagues lourdes.
Politiquement, le « beauf » a souvent des idées bien tranchées et plutôt orientées très à droite (mais ce n’est peut-être qu’un cliché :).
Le beauf aujourd’hui
Aujourd’hui, le terme a pris un sens plus large, et il ne désigne plus seulement une personne.
Tout ce qui est moche ou cliché peut être qualifié de « beauf ». On peut dire que machin porte un « t-shirt de beauf » s’il est habillé comme ça :
Ou qu’il porte une coupe de cheveux comme celle-ci :
On peut même parler de culture « beauf », ou d’art de vivre « beauf », ça s’appelle la « beaufitude« .
Pour finir, il faut préciser que le « beauf » n’est plus uniquement scotché devant la télé, il est entré avec fracas dans l’ère d’Internet : « L’image du beauf qui s’abrutit tout seul devant la télé est dépassée, le beauf moderne utilise internet pour entrer en communion avec les autres beaufs. Grand amateur de photos-montages et de slogans chocs, il ne vérifie rien mais partage tout. D’ailleurs, sur son blog ou sa page facebook, les informations pipeautées défilent à la vitesse des dépêches AFP » (voir ici).
Voilà, le point culturel du dimanche arrive à sa fin. À la semaine prochaine !
Si vous êtes curieux de savoir ce que les Français font le dimanche nous vous recommandons aussi ce billet.
Super, bravo !
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Merci ! 😀
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