42 citations On ne badine pas avec l’amour, Alfred de Musset – Bac de français

On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset entre au programme du Bac de français pour le Bac 2025. Il s’agit d’une comédie en 3 actes, datant de 1834, qui s’inscrit dans le parcours ” les jeux du cœur et de la parole”. Alfred de Musset est un romantique dont les poèmes sont publiés alors qu’il n’a que 18 ans. Il a une relation tumultueuse avec Georges Sand (également écrivaine) et il subit lui-même de terribles désillusions romantiques qui nourriront son inspiration pour écrire, tout comme sa mélancolie. Voici notre sélection de citations de l’oeuvre On ne badine pas avec l’amour, qui suivent l’ordre du texte, et qui sont commentées et contextualisées pour vous permettre de mieux comprendre la pièce.

42 citations On ne badine pas avec l’amour, Alfred de Musset – Bac de français

Citations On ne badine pas avec l'amour, Alfred de Musset - Bac de français
Citations On ne badine pas avec l’amour, Alfred de Musset – Bac de français

Les personnages de l’oeuvre

Le baron.
Perdican, son fils.
Maître Blazius, gouverneur de Perdican.
Maître Bridaine, curé.
Camille, nièce du baron.
Dame Pluche, sa gouvernante.
Rosette, soeur de lait de Camille.

Résumé On ne badine pas avec l’amour

C’est une pièce de théâtre qui se déroule dans un château à la campagne.

Intrigue principale :

  • Perdican, jeune docteur, revient dans son village natal où il doit épouser sa cousine Camille.
  • Camille, élevée au couvent, revient froide et distante, rejetant l’amour.

Jeu de séduction :

  • Perdican, blessé par le rejet de Camille, courtise Rosette, une jeune paysanne.
  • Camille, jalouse, tente de manipuler Perdican.

Conséquences tragiques :

  • Les jeux d’orgueil et de manipulation entre Perdican et Camille blessent Rosette.
  • Lorsque Perdican et Camille réalisent leur amour mutuel, il est trop tard.
  • Rosette, témoin de leur réconciliation, meurt de chagrin.

Thèmes principaux :

  • Les dangers de l’orgueil et de la manipulation en amour
  • Le conflit entre l’amour idéalisé et la réalité
  • La critique de l’éducation religieuse des jeunes filles

La pièce se termine sur une note tragique, illustrant que l’on ne peut jouer impunément avec les sentiments.

Acte I

Scène 2

MAÎTRE BRIDAINE : Cette vieille demoiselle paraît tout à fait pleine d’onction.
LE BARON : Pleine d’onction et de componction, maître Bridaine ; sa vertu est inattaquable.

Cette citation de la pièce de théâtre On ne badine pas avec l’amour d’Alfred de Musset met en scène un échange entre Maître Bridaine et le Baron, révélant plusieurs aspects importants de l’œuvre :

  1. Caractérisation des personnages secondaires :
    Maître Bridaine, par son observation, se montre attentif aux apparences et prompt à juger sur celles-ci. Le Baron, quant à lui, renchérit en utilisant un vocabulaire plus recherché, soulignant son statut social et son désir d’affirmer son autorité.
  2. Ironie dramatique :
    L’utilisation des termes “onction” et “componction” pour décrire la vieille demoiselle (probablement Dame Pluche) crée une ironie subtile. Ces mots, associés à la piété et à la vertu, contrastent avec la réalité des personnages de l’œuvre, souvent moins vertueux qu’ils ne le paraissent.
  3. Thème des apparences trompeuses :
    Cette conversation illustre l’importance des apparences dans la société dépeinte par Musset. La “vertu inattaquable” mentionnée par le Baron suggère une préoccupation pour la réputation plutôt que pour la véritable nature des individus.

Le Baron : Qu’il est austère et difficile le recueillement de l’homme d’État !

Cette réplique du Baron révèle plusieurs aspects importants du personnage et de l’œuvre :

  1. Ironie dramatique : Le Baron se présente comme un “homme d’État” alors qu’il n’est qu’un noble de province. Cette auto-désignation grandiose contraste avec la réalité de son rôle, créant un effet comique.
  2. Caractérisation du personnage : Cette phrase montre le Baron comme un personnage vaniteux qui se donne une importance exagérée. Il incarne la figure du noble de province ridicule, typique de la comédie.
  3. Critique sociale : À travers ce personnage, Musset se moque subtilement de la noblesse provinciale qui imite maladroitement les manières de la cour.
  4. Thème des apparences : Cette réplique s’inscrit dans le thème plus large des apparences trompeuses et de l’hypocrisie sociale, récurrent dans l’œuvre.

Cette phrase, bien que brève, illustre la finesse de l’écriture de Musset, qui utilise l’ironie et le comique pour critiquer les mœurs de son époque tout en développant des personnages complexes et divertissants.

LE BARON
Je serais bien aise de vous voir entreprendre ce garçon, – discrètement, s’entend, – devant sa cousine ; cela ne peut produire qu’un bon effet ; – faites-le parler un peu latin, – non pas précisément pendant le dîner, cela deviendrait fastidieux, et quant à moi, je n’y comprends rien ; – mais au dessert, entendez-vous ?
MAÎTRE BRIDAINE
Si vous n’y comprenez rien, monseigneur, il est probable que votre nièce est dans le même cas.

  1. Caractérisation du Baron :
    Le Baron se montre comme un personnage vaniteux et superficiel. Il souhaite impressionner sa nièce en faisant étalage du savoir de son fils Perdican, sans se soucier de la compréhension réelle. Cette attitude illustre la critique de Musset envers la noblesse provinciale, qui cherche à imiter maladroitement les manières de la cour.
  2. Ironie dramatique :
    L’insistance du Baron sur le latin, qu’il ne comprend pas lui-même, crée une situation ironique. Il veut paraître cultivé sans l’être réellement, ce qui souligne le thème des apparences trompeuses présent dans l’œuvre.
  3. Jeux de pouvoir et manipulation :
    Le Baron tente de manipuler la situation pour créer une impression favorable de Perdican auprès de Camille. Cette manipulation s’inscrit dans le thème plus large des jeux de séduction et de pouvoir qui traversent la pièce.
  4. Critique de l’éducation :
    La réplique de Maître Bridaine souligne l’absurdité de la demande du Baron et met en lumière le fossé entre l’éducation formelle et la compréhension réelle. Cela fait écho à la critique de Musset sur l’éducation religieuse et son impact sur les relations amoureuses.
  5. Comique de situation :
    L’échange entre le Baron et Maître Bridaine crée un effet comique, typique du style de Musset qui mêle habilement comédie et tragédie dans cette pièce.

Au passage précédent fait suite celui-ci :

LE BARON
Raison de plus ; ne voulez-vous pas qu’une femme admire ce qu’elle comprend ? D’où sortez-vous, Bridaine ? Voilà un raisonnement qui fait pitié.
MAÎTRE BRIDAINE
Je connais peu les femmes ; mais il me semble qu’il est difficile qu’on admire ce qu’on ne comprend pas.

Au sujet des femmes, le Baron explique :

LE BARON
Je les connais, Bridaine, je connais ces êtres charmants et indéfinissables. Soyez persuadé qu’elles aiment à avoir de la poudre dans les yeux, et que plus on leur en jette, plus elles les écarquillent, afin d’en gober davantage.

  1. Caractérisation du Baron :
    Le Baron se présente comme un connaisseur des femmes, utilisant un ton condescendant et paternaliste. Cette attitude révèle sa vanité et sa prétention à comprendre le sexe opposé alors qu’à l’évidence, il n’y comprend rien!
  2. Métaphore de la poudre aux yeux :
    L’expression “avoir de la poudre dans les yeux” est utilisée littéralement ici, créant une image comique. Le Baron suggère que les femmes aiment être impressionnées et trompées, ce qui reflète une vision stéréotypée et misogyne des femmes.
  3. Critique sociale :
    À travers les paroles du Baron, Musset critique la superficialité de la société de son époque. L’idée que les femmes “gobent” volontiers les illusions qu’on leur présente souligne la critique de l’auteur envers les jeux de séduction et les apparences trompeuses.

Le fils du Baron vient le voir accompagné de sa cousine Camille. Le baron a formé le projet de les marier. Le Baron les incite à s’embrasser (se saluer) mais Camille a un mouvement de recul.

CAMILLE : L’amitié ni l’amour ne doivent recevoir que ce qu’ils peuvent rendre.

Cette citation de Camille révèle plusieurs aspects importants du personnage et de l’œuvre :

  1. Vision pragmatique de l’amour : Camille exprime une conception rationnelle et mesurée des relations, qu’elles soient amicales ou amoureuses. Elle suggère que les sentiments doivent être réciproques et équilibrés.
  2. Méfiance envers les sentiments excessifs : Cette réplique reflète la prudence de Camille face à l’amour, probablement influencée par son éducation au couvent et les histoires de déceptions amoureuses qu’elle y a entendues.
  3. Thème de la réciprocité : Camille souligne l’importance de l’équilibre dans les relations, un thème central de la pièce qui explore les jeux de pouvoir et les déséquilibres émotionnels entre les personnages.

Cette réplique s’inscrit dans la complexité psychologique des personnages de Musset, illustrant les tensions entre raison et passion, et la difficulté à concilier les idéaux amoureux avec la réalité des relations humaines.

Ce mouvement de recul déplaît fortement au Baron, car il contrarie potentiellement ses projets de mariage. Le curé tente de le rassurer :

MAÎTRE BRIDAINE, au baron. Trop de pudeur est sans doute un défaut ; mais le mariage lève bien des scrupules.

  1. Critique sociale : La remarque suggère une vision du mariage comme une institution qui légitime les relations physiques, reflétant les conventions sociales de l’époque. Musset utilise cette réplique pour critiquer subtilement l’hypocrisie de la société concernant la sexualité et le mariage.
  2. Ironie dramatique : L’optimisme de Maître Bridaine concernant le mariage comme solution aux scrupules de Camille contraste avec la réalité de la situation, créant une tension dramatique que le spectateur perçoit.
  3. Thème de la pudeur : La première partie de la réplique, “Trop de pudeur est sans doute un défaut”, s’inscrit dans le débat plus large de la pièce sur l’innocence, la vertu et leurs limites.
  4. Rôle de conseiller : Bridaine tente de rassurer le Baron sur le comportement distant de Camille, illustrant son rôle de confident et de conseiller auprès du Baron.

Cette réplique, bien que brève, est significative car elle concentre plusieurs des thèmes centraux de la pièce : les tensions entre désir et devoir, l’hypocrisie sociale, et les complications de l’amour et du mariage.

Devant un portrait d’une femme de la famille, la Baron fait ensuite un commentaire comique :

LE BARON
(…) la chère dame n’a jamais concouru, – pour sa part, je crois, autrement qu’en prières, – à l’accroissement de la famille. – C’était, ma foi, une sainte femme.

Cette réplique du Baron dans “On ne badine pas avec l’amour” de Musset révèle plusieurs aspects intéressants :

  1. Ironie subtile : Le Baron utilise un euphémisme pour suggérer que la “chère dame” n’a jamais eu d’enfants, en disant qu’elle n’a “jamais concouru à l’accroissement de la famille”. Cette formulation indirecte crée un effet comique.
  2. Critique sociale voilée : En mentionnant que la dame n’a contribué “qu’en prières”, le Baron fait une allusion ironique à la piété excessive de certaines femmes de l’époque.
  3. Caractérisation du Baron : Cette réplique montre le Baron comme un personnage capable d’humour pince-sans-rire et de commentaires légèrement irrévérencieux, même envers une “sainte femme”.
  4. Thème de la religion : La mention des prières et de la sainteté s’inscrit dans le thème plus large de la religion et de son influence sur la société, récurrent dans l’œuvre.
  5. Contraste comique : L’opposition entre la contribution “en prières” et l’idée d’accroissement de la famille crée un contraste amusant, typique de l’humour de Musset.

Citations On ne badine pas avec l'amour, Alfred de Musset - Bac de français

Pendant ce temps-là, Perdican (fils du Baron et futur médecin) est occupé à observer une fleur.

Scène 3

Le choeur : lorsque deux hommes à peu près pareils, également gros, également sots, ayant les mêmes vices et les mêmes passions, viennent par hasard à se rencontrer, il faut nécessairement qu’ils s’adorent ou qu’ils s’exècrent.

Cette réplique du Chœur est une observation satirique sur la nature humaine et les relations sociales. Elle mérite une analyse approfondie :

  1. Fonction du Chœur : Cette réplique illustre le rôle critique et commentateur du Chœur dans la pièce. Il offre une perspective extérieure et souvent ironique sur les événements et les personnages.
  2. Critique sociale : Musset utilise cette remarque pour pointer du doigt les travers de la société, en particulier la tendance des individus à s’associer ou s’opposer en fonction de leurs similitudes.
  3. Ironie et humour : L’utilisation de termes comme “également gros, également sots” crée un effet comique tout en soulignant la superficialité des relations sociales.
  4. Psychologie humaine : La réplique suggère que les individus similaires sont soit attirés l’un par l’autre, soit en compétition, reflétant la complexité des interactions humaines.
  5. Dualité des réactions : L’opposition entre “s’adorent” et “s’exècrent” souligne l’absence de nuance dans les relations décrites, renforçant l’aspect satirique de l’observation.

Cette réplique s’inscrit dans la critique plus large que Musset fait de la société de son époque, utilisant l’humour et l’ironie pour mettre en lumière les contradictions et les absurdités des comportements humains.

Perdican propose à sa cousine Camille d’aller faire un tour en bateau, celle-ci refuse expliquant que cela l’ennuie. Bien sûr, cela contrarie les plans du Baron. Dame Pluche prend la défense de Camille :

DAME PLUCHE : Seigneur, une jeune fille qui se respecte ne se hasarde pas sur les pièces d’eau.

Cette réplique de Dame Pluche illustre plusieurs aspects importants du personnage et de l’œuvre :

  1. Caractérisation du personnage : Dame Pluche se présente comme la gardienne de la morale et des convenances. Sa réplique reflète son rôle de gouvernante stricte et conservatrice
  2. Thème de la pudeur : La phrase souligne l’importance accordée à la réputation et à la vertu des jeunes filles dans la société dépeinte par Musset. L’utilisation du verbe “se respecte” met l’accent sur l’auto-régulation du comportement féminin
  3. Symbolisme : Les “pièces d’eau” peuvent être interprétées comme une métaphore des dangers et des tentations du monde extérieur, en particulier pour une jeune fille élevée dans un couvent comme Camille
  4. À travers cette réplique, Musset critique subtilement les conventions sociales rigides de son époque, en particulier celles concernant le comportement attendu de la part des femmes.

Le Baron est encore plus contrarié par cette réponse de la gouvernante, mais cette dernière ne se laisse absolument pas démonter :

DAME PLUCHE : Les convenances défendent de tenir un gouvernail, et il est malséant de quitter la terre ferme seule avec un jeune homme.
LE BARON : Mais je répète… je vous dis…
DAME PLUCHE : C’est là mon opinion.
LE BARON : Êtes-vous folle ? En vérité, vous me feriez dire… Il y a certaines expressions que je ne veux pas… qui me répugnent… Vous me donnez envie… En vérité, si je ne me retenais… Vous êtes une pécore, Pluche ! je ne sais que penser de vous. (Il sort.)

Une pécore fait référence à une femme stupide et prétentieuse.

  1. Critique des conventions sociales : La réplique de Dame Pluche souligne à nouveau l’importance excessive accordée aux convenances de l’époque, particulièrement concernant le comportement des jeunes femmes
  2. Ironie dramatique : Le Baron, qui souhaite le mariage de Perdican et Camille, se trouve paradoxalement confronté aux obstacles moraux qu’il a lui-même contribué à mettre en place en choisissant Dame Pluche comme gouvernante.
  3. Caractérisation des personnages :
    • Dame Pluche apparaît inflexible et attachée aux principes, utilisant un langage formel et moralisateur.
    • Le Baron se montre frustré et impuissant face à la rigidité de Dame Pluche, comme le révèlent ses phrases inachevées et son emportement final.
  4. Comique de langage : L’incapacité du Baron à s’exprimer clairement (“Mais je répète… je vous dis…”) et son explosion finale (“Vous êtes une pécore, Pluche !”) créent un effet comique qui contraste avec la gravité apparente du sujet.

Scène 4

Perdican : Ô patrie ! patrie, mot incompréhensible ! l’homme n’est-il donc né que pour un coin de terre, pour y bâtir son nid et pour y vivre un jour ?

Cette réplique de Perdican révèle plusieurs aspects importants du personnage et de l’œuvre :

  1. Questionnement existentiel : Perdican s’interroge sur le sens de l’attachement à un lieu, remettant en question la notion même de patrie. Cette réflexion philosophique montre la profondeur de sa pensée et son esprit critique
  2. Symbolisme : Le “nid” et le “coin de terre” évoquent l’idée d’un espace restreint, contrastant avec les aspirations plus larges que Perdican a pu développer pendant son absence. Cette métaphore souligne le conflit entre l’attachement aux racines et le désir d’horizons plus vastes.
  3. Critique sociale : En qualifiant la patrie d'”incompréhensible”, Perdican remet en question les valeurs traditionnelles et l’importance accordée aux origines, reflétant ainsi l’esprit critique de Musset envers la société de son époque.

Cette réplique s’inscrit dans la complexité psychologique des personnages de Musset, illustrant les tensions entre l’attachement au passé et les aspirations à un avenir plus vaste, thème central de la pièce.

LE CHOEUR : On nous a dit que vous êtes un savant, monseigneur.
PERDICAN : Oui, on me l’a dit aussi (…)

Cette brève réplique entre le Chœur et Perdican peut se comprendre ainsi :

  1. La réponse de Perdican montre une forme d’ironie et de détachement vis-à-vis de son statut de “savant”
  2. Critique de l’éducation : En répondant “on me l’a dit aussi”, Perdican semble remettre en question la valeur réelle de son savoir académique, reflétant potentiellement la critique de Musset envers l’éducation formelle de l’époque
  3. Thème des apparences : L’échange souligne le décalage entre la réputation de Perdican (un savant) et sa propre perception de lui-même, illustrant le thème récurrent des apparences trompeuses dans l’œuvre
  4. Effet comique : La réponse de Perdican crée un effet comique subtil, montrant sa capacité à prendre du recul sur lui-même et sur les attentes de la société à son égard

Perdican aperçoit Rosette, qui est la “soeur de lait” de Camille (elles ont été élevées ensemble) et la salue. Il l’invite au château de son père.

Scène 5

Maître Blazius, qui a veillé à l’éducation du fils du Baron, vient dénoncer le curé pour abus d’alcool. La scène est comique. Les choeurs avaient annoncé plus haut que les deux sont plus bêtes et plus gros l’un que l’autre et ne peuvent pas s’entendre.

MAÎTRE BLAZIUS : Seigneur, j’ai un mot à vous dire ; le curé de la paroisse est un ivrogne.
LE BARON : Fi donc ! cela ne se peut pas.
MAÎTRE BLAZIUS : J’en suis certain ; il a bu à dîner trois bouteilles de vin.

MAÎTRE BLAZIUS : Il a lâché quelques mots latins ; c’étaient autant de solécismes. Seigneur, c’est un homme
dépravé.

  1. Caractérisation de Maître Blazius : Cette remarque montre Blazius comme un personnage pédant et prompt au jugement. Son empressement à critiquer les connaissances linguistiques d’autrui suggère une certaine arrogance intellectuelle.
  2. Critique de l’éducation : En soulignant les “solécismes” commis, Blazius met l’accent sur l’importance accordée à l’éducation classique et à la maîtrise du latin dans la société de l’époque. Cela reflète la critique de Musset envers le système éducatif.
  3. Comique de caractère : L’exagération de Blazius, qui qualifie quelqu’un de “dépravé” simplement pour des erreurs de latin, crée un effet comique en révélant son propre ridicule.
  4. Thème des apparences : Cette réplique s’inscrit dans le thème récurrent des apparences trompeuses. Blazius juge la valeur morale d’une personne sur la base de ses compétences linguistiques, illustrant la superficialité des jugements sociaux.
  5. Ironie dramatique : Le spectateur, conscient des propres défauts de Blazius (notamment son ivrognerie mentionnée ailleurs dans la pièce), perçoit l’ironie de sa condamnation morale basée sur des erreurs de langage.

Arrive Maître Bridaine (le curé), qui vient raconter au Baron ce que fait son fils dehors dans le village :

MAÎTRE BRIDAINE : Je l’ai vu de mes propres yeux. Il ramassait des cailloux pour faire des ricochets.
LE BARON : Des ricochets ? ma tête s’égare ; voilà mes idées qui se bouleversent. Vous me faites un
rapport insensé, Bridaine. Il est inouï qu’un docteur fasse des ricochets.

  1. Caractérisation des personnages :
    • Maître Bridaine apparaît comme un homme dévoué au Baron
    • Le Baron se montre incrédule et attaché aux conventions sociales, incapable d’imaginer qu’un docteur puisse s’adonner à une activité aussi frivole que les ricochets.
  2. Comique de situation : Le contraste entre l’activité enfantine de Perdican (faire des ricochets) et son statut de docteur crée un effet comique, soulignant le décalage entre les attentes du Baron et la réalité.
  3. Critique sociale : La réaction du Baron reflète les préjugés de la société de l’époque concernant le comportement attendu des personnes éduquées. Musset utilise cette scène pour critiquer la rigidité des conventions sociales.
  4. Thème de l’apparence vs réalité : L’incompréhension du Baron face au comportement de Perdican illustre le thème récurrent dans l’œuvre du conflit entre les apparences sociales et la véritable nature des individus.
  5. Ironie dramatique : Le spectateur, conscient de la personnalité de Perdican, perçoit l’ironie de la situation, contrairement au Baron qui reste enfermé dans ses préjugés.

Cette scène s’inscrit dans la critique plus large que fait Musset des mœurs de son époque, utilisant l’humour et l’ironie pour mettre en lumière les contradictions et les absurdités des comportements sociaux.

Voyant son fils par la fenêtre, le Baron est hors de lui et réagit de manière excessive :

LE BARON : Tout est perdu ! perdu sans ressources ! Je suis perdu : Bridaine va de travers, Blazius sent le vin
à faire horreur, et mon fils séduit toutes les filles du village en faisant des ricochets. (Il sort.)

Cette réplique du Baron dans On ne badine pas avec l’amour de Musset est riche en signification et en humour :

  1. Caractérisation du Baron :
    La répétition de “perdu” et l’exagération comique (“Tout est perdu ! perdu sans ressources !”) révèlent un personnage enclin au mélodrame et à l’exagération. Le Baron apparaît comme un homme facilement déstabilisé par les événements qui échappent à son contrôle.
  2. Critique sociale :
    Musset utilise cette tirade pour critiquer subtilement les préoccupations superficielles de la noblesse. Le Baron s’inquiète davantage des apparences et du comportement de son entourage que des véritables enjeux émotionnels qui se jouent entre les personnages principaux.
  3. Comique de situation :
    L’énumération des “catastrophes” crée un effet comique par l’accumulation et le contraste entre des problèmes de nature différente. La juxtaposition de l’ivrognerie de Blazius, de la maladresse de Bridaine et des ricochets de Perdican souligne l’absurdité de la situation aux yeux du Baron.
  4. Ironie dramatique :
    Le spectateur, conscient des véritables enjeux de la pièce (les sentiments complexes entre Perdican et Camille), perçoit l’ironie de la situation. Le Baron se focalise sur des détails insignifiants alors que le véritable drame se joue à son insu.

L’acte premier s’achève ainsi.

Acte II

Scène 1

CAMILLE : Parlons sérieusement, Perdican ; votre père veut nous marier. Je ne sais ce que vous en
pensez ; mais je crois bien faire en vous prévenant que mon parti est pris là-dessus.
PERDICAN : Tant pis pour moi si je vous déplais.
CAMILLE : Pas plus qu’un autre, je ne veux pas me marier ; il n’y a rien là dont votre orgueil puisse
souffrir.

  1. Caractérisation des personnages :
    • Camille apparaît directe et déterminée, annonçant clairement sa décision de ne pas se marier.
    • Perdican réagit avec une certaine amertume, interprétant le refus de Camille comme un rejet personnel.
  2. Thème du mariage arrangé :
    La mention du père de Perdican voulant les marier souligne la tradition des mariages arrangés, que Camille semble rejeter.
  3. Conflit entre raison et sentiment :
    Camille aborde le sujet “sérieusement”, suggérant une approche rationnelle du mariage, en contraste avec les attentes romantiques potentielles de Perdican.
  4. Orgueil et amour-propre :
    La réponse de Perdican (“Tant pis pour moi si je vous déplais”) et la réplique de Camille sur l’orgueil mettent en lumière l’importance de l’amour-propre dans leurs interactions.
  5. Refus du mariage comme institution :
    Camille affirme ne pas vouloir se marier “pas plus qu’un autre”, suggérant une critique plus large du mariage en tant qu’institution plutôt qu’un rejet spécifique de Perdican

Cet échange établit les bases du conflit central de la pièce, mettant en scène deux personnages aux visions opposées de l’amour et du mariage, préfigurant les tensions à venir dans leur relation.

Perdican ne prend pas mal le fait que sa cousine ne veuille pas l’épouser. Il explique que leur amitié est tout aussi importante et valable.

CAMILLE : Je n’aime pas les attouchements.
PERDICAN, lui prenant la main. Donne-moi ta main, Camille, je t’en prie. Que crains-tu de moi ? Tu ne veux pas qu’on nous marie ? eh bien ! ne nous marions pas ; est-ce une raison pour nous haïr ? ne sommes-nous pas le frère et la soeur? Lorsque ta mère a ordonné ce mariage dans son testament, elle a voulu que notre amitié fût éternelle, voilà tout ce qu’elle a voulu. Pourquoi nous marier ? voilà ta main et voilà la mienne ; et pour qu’elles restent unies ainsi jusqu’au dernier soupir, crois-tu qu’il nous faille un prêtre ? Nous n’avons besoin que de Dieu.

  1. Contraste des personnages :
    • Camille apparaît froide et distante, rejetant le contact physique.
    • Perdican se montre plus chaleureux et conciliant, cherchant à établir une connexion.
  2. Recherche d’un consensus :
    Perdican tente de désamorcer la tension en proposant une alternative au mariage, montrant sa capacité d’adaptation et son désir de maintenir un lien avec Camille.
  3. Thème de l’amour fraternel vs amour romantique :
    Perdican évoque leur relation de frère et sœur, suggérant que leur lien peut transcender les conventions du mariage.
  4. Critique des institutions :
    En déclarant “nous n’avons besoin que de Dieu”, Perdican remet en question la nécessité des institutions religieuses pour valider leur relation, reflétant une critique plus large de Musset envers les conventions sociales.
  5. Symbolisme du geste :
    La main tendue de Perdican représente une offre de réconciliation

Camille prévoit de partir le lendemain, elle veut retourner au couvent. Elle dit avoir un secret et laisse une lettre pour Perdican, que Dame Pluche doit lui donner.

Scène 2

Le curé peste en entrant dans la salle à manger du château car sa place va être donnée au gouverneur, qu’il déteste. Il préfère partir. Il ne pense qu’à manger et à boire et sa nouvelle place en bout de table ne lui convient pas.

Scène 3

Rosette et Perdican se promènent, il ne fait que l’embrasser. Il veut savoir quand elle se mariera mais elle refuse d’en parler.

Scène 4

Maître Blazius vient rapporter (au cours d’une scène comique) qu’il a vu Camille avec un papier à la main et qu’elle voulait envoyer Dame Pluche donner ce papier à un homme. Le Baron est très contrarié.

Scène 5

Camille vient directement parler avec Perdican. Elle justifie son comportement et pose beaucoup de questions à ce dernier.

Je vous ai paru brusque et hautaine ; cela est tout simple, j’ai renoncé au monde.

 La déclaration est intéressante. Elle reflète l’influence de l’éducation religieuse de Camille et son choix apparent de se détacher des plaisirs et des relations mondaines.

CAMILLE : Que me conseilleriez-vous de faire le jour où je verrais que vous ne m’aimez plus ?
PERDICAN : De prendre un amant.

  1. Provocation de Camille :
    La question de Camille est une forme de test, cherchant à éprouver les sentiments de Perdican et sa réaction face à l’hypothèse d’une perte d’amour.
  2. Réponse cynique de Perdican :
    En conseillant à Camille de “prendre un amant”, Perdican adopte une attitude provocatrice et détachée, peut-être pour masquer ses véritables sentiments ou pour blesser Camille en retour.
  3. Jeu de l’orgueil :
    Cet échange reflète le thème central de l’orgueil dans la pièce. Les deux personnages refusent de montrer leur vulnérabilité et préfèrent se blesser mutuellement.
  4. Critique des conventions amoureuses :
    La réponse de Perdican peut être vue comme une critique des conventions sociales de l’époque concernant la fidélité et le mariage.

On comprend ensuite que Camille est échaudée de l’amour car une amie l’a vécu et en souffre désespérément.

CAMILLE : Ce que je voulais vous raconter comme une curiosité, c’est que tous les récits de Louise, toutes les fictions de mes rêves portaient votre ressemblance.
PERDICAN : Ma ressemblance à moi ?
CAMILLE : Oui, et cela est naturel : vous étiez le seul homme que j’eusse connu. En vérité, je vous ai aimé, Perdican.

  1. Révélation de Camille
    Camille avoue que Perdican a occupé une place centrale dans son imagination et ses rêves pendant son séjour au couvent. L’utilisation du terme “curiosité” suggère qu’elle tente de minimiser l’importance de cette révélation.
  2. Aveu de ses sentiments passés
    L’aveu final “En vérité, je vous ai aimé, Perdican” marque un tournant dans la pièce. Camille reconnaît enfin ses sentiments passés pour son cousin, brisant la façade de froideur qu’elle maintenait jusqu’alors.

Plus d’une parmi elles sont sorties du monastère comme j’en sors aujourd’hui, vierges et pleines d’espérances. Elles sont revenues peu de temps après, vieilles et désolées. Tous les jours il en meurt dans nos dortoirs, et tous les jours il en vient de nouvelles prendre la place des mortes sur les matelas de crin (…).

  1. Désillusion : Camille évoque le destin tragique des femmes qui quittent le monastère pleines d’espoir, pour y revenir “vieilles et désolées”. Cette image souligne la perte des illusions et la dureté de la vie hors du couvent.
  2. Cycle de la vie : La mention des femmes qui meurent et sont remplacées par de nouvelles arrivantes crée une image de cycle perpétuel et implacable, renforçant l’atmosphère de désespoir.
  3. Critique sociale : À travers les paroles de Camille, Musset dénonce implicitement une société qui laisse peu d’options aux femmes en dehors du mariage ou du couvent.

PERDICAN : Ma soeur chérie, les religieuses t’ont donné leur expérience ; mais, crois-moi, ce n’est pas la tienne ; tu ne mourras pas sans aimer.

CAMILLE : Je veux aimer, mais je ne veux pas souffrir ; je veux aimer d’un amour éternel, et faire des serments qui ne se violent pas. Voilà mon amant. (Elle montre son crucifix.)
PERDICAN : Cet amant-là n’exclut pas les autres.

  1. Perdican critique l’influence du couvent sur Camille, suggérant que son expérience de l’amour est artificielle et empruntée. Sa prédiction “tu ne mourras pas sans aimer” révèle sa conviction que l’amour humain est inévitable, défiant ainsi le choix de Camille.
  2. La réplique de Camille expose sa vision idéalisée de l’amour. Elle cherche un amour parfait, éternel et sans souffrance, reflétant son éducation religieuse et sa peur de la douleur émotionnelle.
  3. Le geste symbolique de Camille montrant son crucifix comme son “amant” illustre son choix de l’amour divin sur l’amour terrestre. Ce choix représente sa quête d’un amour pur et incorruptible.
  4. La réponse cynique de Perdican, “Cet amant-là n’exclut pas les autres”, remet en question la sincérité ou la durabilité de l’engagement de Camille. Il suggère que l’amour divin ne peut pleinement satisfaire les besoins humains

Perdican s’emporte :

Sais-tu ce que c’est que des nonnes, malheureuse fille ? Elles qui te représentent l’amour des hommes comme un mensonge, savent-elles qu’il y a pis encore, le mensonge de l’amour divin ? (…)

Cette réplique de Perdican est chargée de signification et de critique :

  1. Colère et pitié : Perdican utilise une question rhétorique pour exprimer sa colère et son mépris envers l’influence des nonnes sur Camille. L’apostrophe “malheureuse fille” souligne sa frustration et sa pitié pour Camille.
  2. Critique de l’éducation religieuse : Perdican dénonce la façon dont les nonnes ont dépeint l’amour humain comme un mensonge à Camille. Il suggère que cette représentation est trompeuse.
  3. Accusation d’hypocrisie : En demandant si les nonnes sont conscientes du “mensonge de l’amour divin”, Perdican accuse l’institution religieuse d’hypocrisie. Il insinue que l’amour divin prôné par les nonnes est lui-même une illusion, voire un mensonge plus grave que celui qu’elles attribuent à l’amour humain.
  4. Opposition amour terrestre/amour divin : Perdican établit un contraste entre l’amour des hommes et l’amour divin, suggérant que le second est potentiellement plus trompeur que le premier.
  5. Athéisme sous-jacent : Cette réplique révèle le scepticisme de Perdican envers la religion, voire son athéisme. Il remet en question non seulement l’enseignement des nonnes, mais aussi la validité même de l’amour divin.

Cette réplique s’inscrit dans la critique plus large que fait Musset de l’éducation religieuse des jeunes filles au XIXe siècle, montrant comment elle peut les conditionner à craindre l’amour et la vie hors du couvent.

Tous les hommes sont menteurs, inconstants, faux, bavards, hypocrites, orgueilleux ou lâches, méprisables et sensuels ; toutes les femmes sont perfides, artificieuses, vaniteuses, curieuses et dépravées ; le monde n’est qu’un égout sans fond où les phoques les plus informes rampent et se tordent sur des montagnes de fange ; mais il y a au monde une chose sainte et sublime, c’est l’union de deux de ces êtres si imparfaits et si affreux.

Cette citation de Perdican dans On ne badine pas avec l’amour de Musset est une réflexion sur la nature humaine et l’amour :

  1. Critique de l’humanité : Perdican dresse un portrait extrêmement sombre et cynique de l’humanité, énumérant une longue liste de défauts attribués aux hommes et aux femmes. Cette vision pessimiste reflète la désillusion du personnage et, par extension, celle de Musset lui-même.
  2. Métaphore de l’égout : L’image du monde comme un “égout sans fond” peuplé de créatures informes renforce cette vision négative de l’humanité. Cette métaphore souligne la bassesse et la corruption de la société.
  3. Paradoxe de l’amour : Malgré cette description accablante, Perdican affirme que l’union de deux êtres, pourtant décrits comme “imparfaits et affreux”, est “sainte et sublime”. Ce contraste saisissant met en valeur la puissance transformatrice de l’amour.
  4. Critique de l’éducation religieuse : Cette tirade peut être interprétée comme une réponse aux enseignements reçus par Camille au couvent, qui dépeignent l’amour humain comme dangereux et trompeur. Perdican affirme au contraire la valeur suprême de l’amour malgré les imperfections humaines.
  5. Thème central de la pièce : Cette réplique illustre parfaitement le message de l’œuvre : l’amour est une force puissante qui transcende les faiblesses humaines, mais avec laquelle on ne doit pas “badiner” (= plaisanter)

Cette citation emblématique représente bien la pièce de Musset, mêlant cynisme et idéalisme pour souligner la complexité et la beauté paradoxale de l’amour humain.

Perdican : On est souvent trompé en amour, souvent blessé et souvent malheureux ; mais on aime, et quand on est sur le bord de sa tombe, on se retourne pour regarder en arrière, et on se dit : J’ai souffert souvent, je me suis trompé quelquefois, mais j’ai aimé.

Acte III

Scène 1

Perdican se demande s’il est amoureux et le Baron met dehors le curé qu’il accuse de lui prendre son vin.

Scène 2

Maître Bridaine, le curé, souffre d’avoir été évincé du château. Il croise son ennemi, Maître Blazius, qui ne veut pas retourner au château par orgueil car sa place a justement été donnée à Bridaine. Bridaine demande de l’aide à Blazius pour retrouver sa place chez le Baron, mais Blazius est trop content de pouvoir récupérer sa place.

Il ne reste à Bridaine qu’une solution : attraper le mot que Camille a écrit et dont il a parlé au Baron, pour lui prouver qu’il n’a pas menti.

Passe Dame Pluche, elle a un papier en main, il lui saut dessus et lui promet la mort si elle ne le lui donne pas ! Tandis qu’ils se battent, Perdican passe et leur prend des mains le mot. Il comprend que c’est un mot de Camille à une des nonnes du couvent, où elle lui dit que leur plan de le dégoûter d’elle (dégoûter Perdican de Camille) fonctionne, qu’il souffre, et qu’elle pourra retourner tranquillement au couvent le lendemain.

Perdican est piqué au vif, il ne ressent plus de sentiments pour Camille et décide de lui prouver qu’il n’est pas affecté par son rejet.

Il va chercher Rosette pour rendre Camille jalouse.

Scène 3

Perdican fait une déclaration d’amour à Rosette alors qu’il a donné rendez-vous à Camille pour venir être témoin de la scène près de la fontaine. Camille voit tout.

tu m’aimeras mieux, tout docteur que je suis et toute paysanne que tu es, que ces pâles statues, fabriquées par les nonnes, qui ont la tête à la place du coeur, et qui sortent des cloîtres pour venir répandre dans la vie l’atmosphère humide de leurs cellules

  1. Opposition entre amour véritable et artificiel : Perdican affirme que son amour pour Rosette, malgré leurs différences sociales, est plus authentique que celui prôné par les religieuses. Il met en contraste la chaleur de sentiments sincères avec la froideur des “pâles statues” que représentent les nonnes.
  2. Critique de l’éducation conventuelle : L’expression “fabriquées par les nonnes” suggère que l’éducation religieuse produit des êtres artificiels, dénués de sentiments véritables. Perdican dénonce ainsi l’influence néfaste du couvent sur la formation émotionnelle des jeunes filles.
  3. Métaphore anatomique : “qui ont la tête à la place du cœur” illustre de manière frappante le reproche fait aux religieuses de privilégier la raison et les préceptes au détriment des sentiments et de l’amour.
  4. Imagerie sensorielle : L’évocation de “l’atmosphère humide de leurs cellules” crée une image de froideur et d’isolement, symbolisant l’effet délétère de l’éducation conventuelle sur la vie affective.

scène 4

Alors que Dame Pluche prépare le départ, Camille refuse de partir et se montre grossière.

scène 5

Bridaine raconte au Baron la scène de la déclaration de Perdican à Rosette.

scène 6

Camille va trouver Rosette, elle lui explique que Perdican ne l’aime pas et que ce qu’il a fait est une vengeance. Elle lui propose de se cacher derrière le rideau pour en savoir plus.

Connaissez-vous le coeur des femmes, Perdican ? Êtes-vous sûr de leur inconstance, et savez-vous si elles changent réellement de pensée en changeant quelquefois de langage ?

  1. Questionnement rhétorique : Camille utilise une série de questions pour remettre en cause les certitudes de Perdican concernant la nature féminine. Ces interrogations visent à déstabiliser son interlocuteur et à l’amener à reconsidérer ses préjugés
  2. Critique des stéréotypes : En questionnant l’inconstance supposée des femmes, Camille remet en question un stéréotype répandu à l’époque. Elle invite Perdican (et par extension le lecteur/spectateur) à dépasser les idées reçues sur la nature féminine

Avez-vous bien réfléchi à la nature de cet être faible et violent, à la rigueur avec laquelle on le juge, aux principes qu’on lui impose ?

  1. La vision que les hommes ont des femmes au XIXe siècle :
    • “Être faible” reflète la perception sociale de la femme au XIXe siècle.
    • “Violent” suggère une force intérieure ou une passion réprimée, contrastant avec l’image de faiblesse.
  2. Critique sociale :
    • “La rigueur avec laquelle on le juge” dénonce la sévérité des normes sociales imposées aux femmes.
    • “Les principes qu’on lui impose” souligne le manque de liberté et l’oppression sociale subis par les femmes.
  3. Invitation à la réflexion :
    La question “Avez-vous bien réfléchi” incite Perdican (et le lecteur) à reconsidérer les préjugés sur les femmes.
  4. Perspective féministe avant l’heure :
    Camille remet en question les structures sociales qui définissent les femmes et les considèrent inférieures aux hommes.

PERDICAN : Je n’entends rien à tout cela, et je ne mens jamais. Je t’aime, Camille, voilà tout ce que je sais.
CAMILLE : Vous dites que vous m’aimez, et vous ne mentez jamais ?
PERDICAN : Jamais.

Camille prend Perdican à son jeu. Il lui dit qu’il l’aime alors qu’il l’a dit également à la paysanne Rosette, à qui il a promis le mariage. Elle prouve qu’il est bel et bien un menteur et un manipulateur :

Camille : Je ne vous aime pas, moi ; je n’ai pas été chercher par dépit cette malheureuse enfant au fond de sa chaumière, pour en faire un appât, un jouet ; je n’ai pas répété imprudemment devant elle des paroles brûlantes adressées à une autre ; je n’ai pas feint de jeter au vent pour elle le souvenir d’une amitié chérie ; je ne lui ai pas mis ma chaîne au cou ; je ne lui ai pas dit que je l’épouserais.

Cette réplique de Camille dans On ne badine pas avec l’amour de Musset est chargée d’accusations et de reproches envers Perdican :

  1. Affirmation catégorique : Camille commence par une déclaration sans ambiguïté : “Je ne vous aime pas, moi”. Le “moi” en apposition renforce son opposition à Perdican.
  2. Accusation de manipulation : Camille reproche à Perdican d’avoir utilisé Rosette comme un “appât” et un “jouet”. Ces termes soulignent la cruauté perçue dans les actions de Perdican.
  3. Imprudence et insensibilité : L’accusation de répéter “imprudemment” des “paroles brûlantes” devant Rosette met en lumière le manque de considération de Perdican pour les sentiments de la jeune paysanne.
  4. Fausse promesse : Camille accuse Perdican d’avoir feint de jeter au vent le souvenir de leur amitié pour Rosette, suggérant une tromperie délibérée.
  5. Symbolisme de l’engagement : La mention de la “chaîne au cou” évoque une forme d’asservissement, impliquant que Perdican a lié Rosette à lui de manière inappropriée.
  6. Fausse promesse de mariage : L’accusation finale concernant la promesse de mariage souligne la gravité des actions de Perdican aux yeux de Camille.

Cette réplique révèle la perspicacité de Camille, qui a vu clair dans le jeu de Perdican. Elle dénonce son comportement manipulateur et irresponsable, tout en affirmant sa propre intégrité morale. Ce passage illustre la complexité des relations entre les personnages et les jeux dangereux de l’amour, thème central de la pièce de Musset.

Camille continue à accuser Perdican d’avoir blessé Rosette pour se venger d’elle (Camille).

tu as voulu me lancer à tout prix quelque trait qui pût m’atteindre, et tu comptais pour rien que ta flèche
empoisonnée traversât cette enfant, pourvu qu’elle me frappât derrière elle.

Elle critique son orgueil qui est la cause de ce comportement irrespectueux : Perdican a joué avec l’innocence de Rosette par orgueil et par désir de vengeance.

Perdican n’a pas grand chose à dire pour sa défense, même s’il ne se laisse pas faire :

tu as voulu me prouver que j’avais menti une fois dans ma vie ; cela est possible, mais je te trouve hardie de décider à quel instant.

  • Concession partielle : En admettant “cela est possible”, Perdican montre une certaine ouverture, mais maintient une position de force.
  • Ambiguïté temporelle : En contestant le moment du mensonge, Perdican introduit un doute sur la nature exacte de ce qu’il considère comme vrai ou faux.
  • Jeu de pouvoir : Cette réplique illustre la lutte constante entre Camille et Perdican pour garder le contrôle de leur relation et de la vérité.

Scène 7

Camille va voir le Baron pour faire en sorte qu’il empêche le mariage de Perdican et de Rosette. Le Baron est absorbé par son malheur et n’écoute pas.

Perdican est toujours lancé dans son défi d’épouser Rosette, du moins, c’est ce qu’il proclame. Il cherche à rendre Camille jalouse.

Elle est jeune et jolie, et elle m’aime ; c’est plus qu’il n’en faut pour être trois fois heureux. Qu’elle ait de l’esprit ou qu’elle n’en ait pas, j’aurais pu trouver pire.

CAMILLE : Mais vous n’y pensez pas ; c’est une fille de rien.
PERDICAN : Elle sera donc de quelque chose, lorsqu’elle sera ma femme.

Camille apparaît comme moins bien intentionnée qu’elle ne semblait au départ.

  1. Préjugés sociaux : La réplique de Camille “c’est une fille de rien” reflète les préjugés de classe de l’époque, considérant le statut social comme déterminant de la valeur d’une personne
  2. Défi aux conventions : La réponse de Perdican “Elle sera donc de quelque chose, lorsqu’elle sera ma femme” montre sa volonté de défier les normes sociales. Mais c’est surtout une provocation !
  3. Jeu de manipulation : Cet échange s’inscrit dans le jeu de manipulation entre Camille et Perdican, où ils utilisent leurs paroles pour provoquer des réactions chez l’autre
  4. Critique sociale : Musset utilise ce dialogue pour critiquer les conventions sociales de son époque, notamment concernant le mariage et les classes sociales

Les préjugés sociaux de Camille sont très forts. Elle fait tout pour dégoûter Perdican de Rosette :

CAMILLE : Elle vous ennuiera avant que le notaire ait mis son habit neuf et ses souliers pour venir ici ; le
coeur vous lèvera au repas de noces, et le soir de la fête vous lui ferez couper les mains et les
pieds, comme dans les contes arabes, parce qu’elle sentira le ragoût.

Arrive Rosette qui demande à cesser les plans de mariage car elle sait qu’elle est victime d’une manipulation :

ROSETTE, se mettant à genoux. Monseigneur, je viens vous demander une grâce. Tous les gens du village à qui j’ai parlé ce matin m’ont dit que vous aimiez votre cousine, et que vous ne m’avez fait la cour que pour vous divertir tous deux ; on se moque de moi quand je passe, et je ne pourrai plus trouver de mari dans le pays, après avoir servi de risée à tout le monde. Permettez-moi de vous rendre le collier que vous m’avez donné et de vivre en paix chez ma mère.

  1. Vulnérabilité de Rosette : En se mettant à genoux, Rosette adopte une posture de supplication, soulignant sa position inférieure et sa détresse.
  2. Conséquences sociales : La réplique met en lumière les répercussions du jeu cruel de Perdican sur la réputation de Rosette dans son village. Elle est devenue un objet de moquerie et risque de ne plus pouvoir se marier.
  3. Prise de conscience : Rosette comprend qu’elle a été utilisée comme un pion dans le jeu entre Perdican et Camille, révélant sa naïveté initiale et son éveil douloureux à la réalité.

Perdican continue de proclamer qu’il veut épouser Rosette et Camille commence à se sentir mal.

scène 8

Camille prie Dieu. Perdican s’en veut d’avoir été guidé par l’orgueil :

PERDICAN : Orgueil ! le plus fatal des conseillers humains, qu’es-tu venu faire entre cette fille et moi ? La voilà pâle et effrayée, qui presse sur les dalles insensibles son coeur et son visage. Elle aurait pu m’aimer, et nous étions nés l’un pour l’autre ; qu’es-tu venu faire sur nos lèvres, orgueil, lorsque nos mains allaient se joindre ?

  1. Personnification de l’orgueil : Perdican s’adresse directement à l’orgueil, le personnifiant comme un acteur maléfique qui s’est immiscé entre Camille et lui. Cette apostrophe souligne le rôle central de l’orgueil dans le drame qui s’est joué
  2. Reconnaissance tardive : Perdican réalise trop tard que l’orgueil a été le principal obstacle à son bonheur avec Camille. Il le qualifie de “plus fatal des conseillers humains”, reconnaissant son pouvoir destructeur.
  3. Description poignante : L’image de Camille “pâle et effrayée” pressant son cœur contre les dalles évoque la souffrance et le désespoir causés par leurs jeux d’orgueil.
  4. Destin contrarié : La phrase “nous étions nés l’un pour l’autre” exprime le sentiment d’un amour prédestinés que l’orgueil a empêché de s’épanouir
  5. Métaphore physique : L’orgueil est décrit comme s’interposant entre leurs lèvres et leurs mains, symbolisant concrètement comment il a empêché leur rapprochement et leur union

Perdican : Insensés que nous sommes ! nous nous aimons. Quel songe avons-nous fait, Camille ?

Perdican : Lequel de nous a voulu tromper l’autre ?

Perdican : Il a bien fallu que nous nous fissions du mal, car nous sommes des hommes. Ô insensés ! nous nous aimons. (Il la prend dans ses bras.)

Camille et Perdican s’avouent tous les deux leur amour et cessent leurs jeux.

Cependant, Rosette, qui les a vus, meurt en entendant cela.

Conclusion

La pièce se termine d’une manière tragique. On peut donc saisir le sens du titre : “on ne badine pas avec l’amour” signifie “on ne plaisante pas avec l’amour“, autrement dit, l’amour est une affaire sérieuse et jouer avec peut avoir des conséquences désastreuses.

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