Dans Manon Lescaut (1731), l’Abbé Prévost raconte l’histoire du jeune chevalier Des Grieux et de Manon, deux amants emportés par une passion dévorante qui les conduit à leur perte. Ce roman emblématique du XVIIIe siècle mêle amour, souffrance et fatalité, offrant une réflexion poignante sur les conséquences destructrices des passions humaines. La mort tragique de Manon dans le désert américain marque l’apogée de cette descente aux enfers, laissant le lecteur s’interroger : la tragédie finale est-elle le résultat d’une passion fatale et destructrice ? À travers une analyse des éléments tragiques dans la destinée des personnages, de la dimension sociale et morale de leur chute, ainsi que des procédés narratifs et stylistiques qui amplifient le drame, cette dissertation explore les multiples facettes de cette œuvre à étudier pour le Bac de français.

Dissertation : Dans Manon Lescaut, pensez-vous que la tragédie finale est due à la passion, qui agit de manière fatale et destructrice ?

1.Analyse du sujet de dissertation

Dans Manon Lescaut, pensez-vous que la tragédie finale est due à la passion, qui agit de manière fatale et destructrice ?

Mots-clés :

• tragédie finale : mort de Manon dans le désert et échec de l’amour

• passion : amour intense

• fatale : (passion) qui conduit à la mort

• destructrice : passion qui détruit les espoirs des deux jeunes amants et qui mène à la mort de Manon

2. Reformulation de la problématique

Autrement dit :

Est-ce la PASSION qui cause la fin tragique dans Manon Lescaut ?

3. Réflexion

En partie oui, car la passion est le point de départ de la marginalisation du couple et de Des Grieux en particulier (Manon était déjà dans la marginalité).

Mais il n’y a pas que la passion qui cause la fin tragique, il y a aussi :

• le destin implacable (c’était destiné à se passer comme ça, ils ne pouvaient pas lutter)

• les mauvais choix sont aussi en cause (pour Des Grieux arrêter ses études alors qu’il n’a pas d’argent, pour Manon vivre pour le plaisir et être prête à tout pour ne manquer de rien, les arnaques, les jeux d’argent…)

• la pression de la société de l’époque est également en cause, car elle ne leur permet pas de vivre librement et de s’aimer sans tomber dans la marginalité et dans la fuite

Nous avons donc au moins 3 axes que nous pouvons développer dans la dissertation.

4. Plan de la dissertation

Voici notre proposition de dissertation complète :

Introduction

Dans Manon Lescaut (1731), l’Abbé Prévost raconte l’histoire d’amour tumultueuse entre le chevalier Des Grieux et Manon Lescaut, deux amants emportés par une passion dévorante qui les conduit inexorablement à leur perte. Ce roman emblématique du XVIIIe siècle mêle amour, fatalité et critique sociale, tout en explorant les conséquences destructrices des choix humains face aux contraintes imposées par leur époque. La mort tragique de Manon dans le désert américain marque l’apogée de cette descente aux enfers, laissant le lecteur s’interroger : la tragédie finale est-elle uniquement due à la passion fatale et destructrice, ou résulte-t-elle également de leurs mauvais choix et des pressions sociales ? Pour répondre à cette question, nous analyserons d’abord le rôle du destin implacable, avant d’examiner les erreurs des personnages, puis l’influence des normes sociales sur leur chute.

I. La passion, catalyseur de la tragédie, qui pousse les jeunes à faire de mauvais choix

La passion est indéniablement un catalyseur de la tragédie finale dans Manon Lescaut. C’est bien l’amour qui pousse Des Grieux à tous les excès et qui participe à leur chute. La passion pousse Des Grieux à faire des choix : il abandonne ses études pour suivre Manon, un acte impulsif qui le prive de toute stabilité financière et sociale. Sa dépendance émotionnelle envers elle le pousse à des actes immoraux tels que les jeux d’argent ou les arnaques, compromettant davantage son avenir. Sa passion aveugle pour Manon l’empêche de réfléchir aux conséquences de ses actions : il sacrifie tout pour elle sans jamais envisager d’autres solutions.

De son côté, Manon incarne un pragmatisme opportuniste et une passion du plaisir qui la conduit à privilégier le luxe et le confort matériel au détriment de la morale. Prête à manipuler des hommes riches pour subvenir à ses besoins, elle entraîne Des Grieux dans une spirale de tromperies et d’escroqueries. Par exemple, l’arnaque orchestrée contre M. de G. finit par provoquer leur arrestation et leur emprisonnement. 

Ainsi, bien que leurs décisions soient motivées par leurs passions respectives – l’amour pour Des Grieux et le plaisir pour Manon –, elles révèlent également une incapacité à agir avec prudence ou responsabilité qui est aussi la conséquence de leur jeune âge.

II. Le destin implacable des personnages

Magré l’impact de la passion sur les choix opérés par les personnages, la tragédie finale de Manon Lescaut semble, à bien des égards, dictée par un destin implacable auquel les personnages ne peuvent échapper. Dès leur rencontre, Des Grieux est irrémédiablement attiré par Manon, une passion qu’il décrit comme une force incontrôlable : « Son esprit, son cœur, sa douceur et sa beauté formaient une chaîne si forte et si charmante que j’aurais mis tout mon bonheur à n’en sortir jamais ». Cette attraction irrésistible scelle leur destin dès le début du récit.

Tout au long du roman, les événements semblent conspirer contre eux. Chaque tentative de construire une vie ensemble est vouée à l’échec : leurs fuites répétées, leurs emprisonnements et finalement leur exil en Louisiane témoignent d’une lutte vaine contre des forces supérieures. La mort de Manon dans le désert symbolise l’aboutissement inéluctable de leur tragédie. Ce dénouement fataliste reflète l’idée que leur amour était condamné dès le départ, comme si leur union transgressait un ordre moral ou divin qu’ils ne pouvaient défier.

Cependant, cette vision fataliste n’exclut pas la responsabilité des personnages eux-mêmes dans leur chute. Si le destin joue un rôle important, leurs choix contribuent également à précipiter leur déchéance, tout comme la force de la pression sociale qui s’exerce sur eux, limitant leurs options.

III. La pression sociale dans la France du XVIIIe, un cadre oppressant

Enfin, la société du XVIIIe siècle joue un rôle crucial dans la tragédie finale en imposant des normes rigides qui marginalisent les protagonistes. En tant que femme issue d’un milieu modeste, Manon est limitée dans ses choix : soit elle se marie selon les conventions sociales, soit elle devient une courtisane pour survivre. Son attrait pour le luxe et son refus des contraintes traditionnelles la placent immédiatement en dehors des cadres acceptables. La société condamne son comportement tout en exploitant sa beauté comme un outil de pouvoir.

De même, Des Grieux subit la pression sociale liée à son rang aristocratique. Son amour pour Manon est perçu comme une transgression inadmissible par sa famille et ses pairs. L’opposition constante entre leurs aspirations personnelles et les attentes sociales les pousse dans la marginalité et dans une vie de fuite permanente. L’exil en Louisiane symbolise cette exclusion définitive : incapables de s’intégrer dans la société européenne, ils sont contraints de chercher refuge ailleurs. Les choix immoraux des personnages qui conduiront à la fin tragique de Manon ne sont pas seulement dictés par leurs désirs personnels mais aussi par une société qui valorise le statut social et les richesses matérielles.

Cette critique implicite des normes sociales montre que la tragédie finale n’est pas uniquement imputable aux personnages eux-mêmes ou au destin mais qu’elle est aussi le produit d’un environnement oppressif qui ne laisse aucune place à l’amour libre.

Conclusion

En définitive, la tragédie finale de Manon Lescaut résulte d’une combinaison complexe entre une passion dévorante, un destin implacable, et les contraintes sociales étouffantes du XVIIIe siècle. Si la passion destructrice qui unit Des Grieux et Manon semble sceller leur sort dès le début du récit, leurs décisions imprudentes – telles que l’abandon des études ou les escroqueries – précipitent leur chute. Enfin, la société elle-même contribue largement à leur marginalisation en refusant toute forme d’amour qui défie ses conventions rigides.

À travers ce drame poignant, l’Abbé Prévost offre une réflexion intemporelle sur les passions humaines et sur l’impossibilité de concilier désir individuel et exigences sociales. Cette œuvre tragique continue ainsi d’interroger nos propres choix face aux forces qui nous dépassent – qu’elles soient intérieures ou extérieures – tout en nous rappelant que certaines luttes sont parfois perdues d’avance.

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