Les langues, la mondialisation et la glottophagie selon Louis-Jean Calvet

Le titre vous fait sourciller et vous vous demandez quel lien il peut bien y avoir entre tous ces mots ? Cet article est fait pour vous, c’est certain, et la bonne nouvelle c’est que vous n’avez même pas besoin d’être calé en linguistique pour comprendre.

Louis-Jean Calvet est UN sociolinguiste français renommé et prolifique. On va parler de lui, puis on introduira la glottophagie et enfin on abordera brièvement la question des langues et de la mondialisation.

Article rédigé en 2017 et actualisé en août 2022

Photo de SHVETS production sur Pexels.com

Les langues, la mondialisation et la glottophagie selon Louis-Jean Calvet

Qui est Louis-Jean Calvet?

Linguiste célèbre, professeur à l’Université, journaliste à ses heures perdues, Louis-Jean Calvet a notamment contribué à la création d’une sociolinguistique française et ses écrits sont aussi nombreux que fondateurs.  

Il défend la diversité linguistique et s’est penché sur des questions aussi passionnantes que la linguistique et le colonialisme, le rapport idéologique qui existe entre les langues et le pouvoir, les fractures linguistiques dans les banlieues françaises, il a analysé le discours politique français – à l’instar de Cécile Alduy dont nous avons déjà parlé – et en particulier les mots de Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2008, ou encore il a questionné la langue comme étant une potentielle « construction » des linguistes. 

La glottophagie, une notion développée par Louis-Jean Calvet

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Louis-Jean Calvet, Linguistique et colonialisme, 2e édition, Petite Bibliothèque Payot, 1979

Dans ses publications, Louis-Jean Calvet a particulièrement travaillé dès les années 70 sur la question de la « glottophagie » qui est un point-clé de l’interview parue sur le site de Sciences Humaines.

Globalement, quand on parle de glottophagie, il s’agit de langues qui « en mangent » d’autres, c’est-à-dire que cela concerne la domination de certaines langues sur d’autres.

A l’origine, le linguiste français à étudié ce phénomène dans le contexte de la décolonisation, et il a argué que la domination qu’une langue cherche à exercer sur d’autres est l’un des éléments qui constituent les modalités de l’oppression.

Cela s’illustre par exemple par le fait de ranger certaines langues dans les catégories « dialecte« , « patois » ou « jargon«  alors que d’autres sont reconnues comme des « langues » à part entière, ou alors lorsque des hiérarchies sont établies entre des langues écrites, perçues comme « plus raffinées », et des langues orales, qui sont regardées de haut, voire méprisées.

Ainsi, les rapports sociaux et les rapports politiques transparaissent dans les langues, et la glottophagie est analysée par l’auteur dans le contexte de la politologie des langues.

Comment la mondialisation affecte les langues ?

Le sociolinguiste a écrit un ouvrage intitulé Les Langues : quel avenir ? Les effets linguistiques de la mondialisation :

L’auteur y montre qu’aujourd’hui (et ce n’est pas une surprise) certaines langues sont perçues comme plus importantes que d’autres et que l’un des effets principaux de la mondialisation est l’attribution aux langues d’une valeur marchande.

Il dresse ce qu’il appelle « un baromètre des langues » qui étudie le »poids »  des langues (et non leur importance, car il ne pense pas qu’une langue soit supérieure ou plus importante qu’une autre).

Pour résumer, car ce n’est pas forcément très simple à expliquer, ce poids est défini selon 11 critères retenus d’après les nombreuses études faites par le socio-linguiste, et l’on peut pondérer l’importance de ces critères en fonction de l’importance que l’on souhaite accorder à chacun. Au final, on obtient un classement des langues en fonction du score obtenu. ( voir Baromètre des langues ).

Avant pondération, le poids des langues est le suivant :

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Surprise, le mandarin n’arrive qu’en 10e position ! Normal somme toute, puisque le baromètre évalue des critères comme la statut de langue officielle, le nombre d’articles rédigés sur Wikipédia dans la langue ou encore le taux de pénétration Internet…

95% de la population mondiale parle 5% des langues du monde

Pour en savoir plus, nous vous recommandons la conférence de Calvet qu’il a donnée en 2013 à Paris et où il parle du baromètre des langues:

Pour conclure

La plupart des langues risquent-elles de disparaître au profit de l’anglais? Comment réussir à gérer ces rapports de force entre les langues? 

Si l’on parle beaucoup de la mondialisation et beaucoup des langues aussi, la question de l’effet de la mondialisation sur les langues est très pertinente alors qu’elle est paradoxalement rarement abordée. Louis-Jean Calvet nous éclaire sur ces questions. 

Voilà, vous en savez suffisamment pour vous lancer dans la découverte de ses ouvrages passionnants ! 

Petite bibliographie :

  • Calvet, L-J (2017). Les langues : quel avenir ? Les effets linguistiques de la mondialisation, CNRS éditions
  •  Calvet, L-J (2016). La Méditerranée, mer de nos langues, CNRS éditions
  • Calvet, L-J (2017). La sociolinguistique. Presses Universitaires de France. https://doi.org/10.3917/puf.calve.2017.01

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